L'anecdote des étiquettes

Publié le par Stevan Sulliven

Ce matin, dans le rayon des biscuits, j'ai reçu une nouveauté: les "Paille d'or au citron". En réduisant le facing des "barquettes Trois Châtons à l'abricot", j'ai réussi à lui faire une place dans le rayon, à proximité des autres membres de la famille Paille d'Or. J'étais fier de moi d'avoir fait ça tout seul comme un grand. Mais pour finir le travail, encore me fallait-il imprimer la nouvelle étiquette...
Armé d'un paquet de "Paille d'Or au citron", de l'étiquette de l'entrepôt mentionnant toutes les informations nécéssaires à la création du produit dans la base de données, je me dirige d'un pas important et néamoins pressé vers l'ordinateur. Il n'y a qu'un seul PC muni d'une unique imprimante dans tout le magasin pour l'ensemble des ELS. Il ne sert pas qu'aux étiquettes, mais aussi aux commandes et aux inventaires. C'est pourquoi, quand j'arrive devant le poste, je constate avec agacement qu'une foule s'agglutine devant la machine. Au bout de cinq minutes, je poireaute toujours, mais comme c'est le tour de Bouchra, et qu'elle aussi vient imprimer les étiquettes des nouveautés, une idée me vient. Je lui passe subrepticement le paquet de gateaux, et retourne à mon rayon en arborant un air satisfait. Quelques colis plus tard, Bouchra arrive, mais s'excuse: apparemment, l'étiquette n'est pas sortie avec les siennes, je n'ai plus qu'à retourner faire la queue.
Heureusement, le rush est passé et je n'ai pas à  attendre trop longtemps pour pouvoir enfin m'installer au clavier. Après avoir scanné le code-barre, je renseigne les champs vides. Tout se passe bien, jusqu'au moment où l'imprimante, au lieu de me recracher l'étiquette tant convoitée, éructe un listing sybillin avant de se taire. Je réitère la manipulation, mais le résultat est le même. Je m'empare avec rage de la feuille incompréhensible sortie des entrailles à jet d'encre de cette imprimante qui semble ne pas valoir un clou, voire un poulpe, et m'en vais demander conseil au chef boucher qui officie dans le bureau voisin. Il m'explique gentiment que je me suis trompé de raccourci clavier, et qu'au lieu d'imprimer l'étiquette de mon produit, j'ai demandé à avoir la liste des étiquettes imprimées aujourd'hui. Je chiffonne brutalement le papier, en fait une boule, et tente un panier avec la poubelle. La feuille froissée heurte le bord du cercle, mais rentre tout de même. Ragaillardi par cet exploit sportif, je finis par faire entendre raison aux machines, et obtient enfin la fameuse étiquette.
De retour dans mon rayon, le directeur m'interpelle: "Hé! T'étais passé où, là? Je te payes pas pour te ballader, alors t'as intérêt à arrêter de glander parce que je t'ai à l'oeil désormais!"
Je me suis remis à massacrer du colis en quatrième vitesse, car j'ai compris que ça ne valait même pas la peine de chercher à me justifier. Dans un monde où chacun est persuadé que l'autre est un fainéant en puissance qui tape des siestes de mexicain à sombrero dès que vous avez le dos tourné, votre seul chance de survivre est d'égorger un maximum de palettes, et zigzaguer entre les balles perdues des remarques souvent injustifiées des chefs. Mais chaque matin, je revêtirai ma ceinture de soutien lombaire comme un gilet pare-balle, et l'âme du guerrier qui sommeille en moi m'insufflera l'instinct de survie necessaire. Car je ne peux succomber, j'ai une famille à nourrir.
Alors chaque matin, je partirai au travail comme on part au combat!
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Commenter cet article
Z
<br /> Bouchra<br /> <br /> <br />
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S
<br /> bouchra pas?<br /> lol<br /> <br /> <br />
Z
<br /> C'est "Pipe" le nom de ta collègue?<br /> ;)<br /> <br /> <br />
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S
<br /> Désolé, comprends pas! :o<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Ah! OK... Bouchra pipe! Que c'est spirituel...<br /> <br /> <br />